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Les différentes versions de Våren op.33 n°2Laurent Beeckmans
| Parmi les quelques 150 mélodies composées par Grieg, Våren ("Le Printemps") sur un poème de Aasmund Olavsson Vinje est certainement une des plus connues, mais sa célébrité s'explique certainement par les deux autres versions que Grieg a réalisées. La version originale date de mai 1880, et Grieg en donne immédiatement après une seconde version pour cordes seules. Inclue dans les Deux mélodies élégiaques op.34, elle a été rebaptisée pour l'occasion Siste Vår, c'est-à-dire "Dernier Printemps". La troisième version est celle pour chant et orchestre et date de 1894. Les trois versions ne sont pas complétement identiques, la deuxième diffère fortement du point de vue de la tonalité et de l'harmonisation. La mélodie originale écrite en fa# majeur pose d'emblée un problème pratique. Sur son manuscript, Grieg a recopié l'intégralité du poème de Vinje long de 48 vers. Le tout est divisé en 4 strophes de 12 vers, le texte s'alignant en 4 couches superposées sous la portée du chant (voir le texte complet sur la page de l'opus 33).
Les mesures entre barres de reprises sont donc logiquement destinées à être interprétées 4 fois de suite, ce qui est rarement exécuté par les chanteurs, aussi bien sur le disque qu'en concert. Aussi sublime qu'est cette mélodie, sa répétition 4 fois de suite mènerait à une durée d'environ 9 minutes et ne pourrait que lasser l'auditeur, en tenant compte aussi de l'accompagnement pianistique très dépouillé (certaines mesures ne contiennent qu'un accord en rondes ou deux accords en blanches). En conséquence, la plupart des enregistrements optent pour la coupure des 2 strophes centrales, et ne font donc entendre que les 12 premiers et 12 derniers vers, au détriment du sens poétique. L'enregistrement de Monica Groop dans l'intégrale des mélodies enregistrées pour BIS fait entendre les strophes 1, 3 et 4. La deuxième version pour cordes de l'opus 34 est transposée un demi-ton plus haut, c'est-à-dire en sol majeur, cette tonalité facilitant sans aucun doute l'exécution plutôt que la tonalité à 6 dièses originale (où on trouve même un si double dièse!). La mélodie est répétée deux fois, mais l'harmonisation est beaucoup plus séduisante que dans la première version. Plutôt qu'avoir indiqué une simple reprise, Grieg réécrit complétement la deuxième "strophe" dans laquelle il redouble d'inventivité quant aux harmonies et aux modulations imprévues. Le débit rythmique plus animé élimine aussi l'aspect quelque peu statique de la version originale. Curieusement, la petite ritournelle finale qui montait vers l'aigu du piano a été remplacée par une formule tournant étrangement en rond sur 3 notes:
La troisième version est une orchestration fidèle de la version originale, et dans la même tonalité de fa# majeur. Comme dans la première version, il n'y a donc pas de différence entre l'accompagnement des strophes. Ici aussi la ritournelle finale est transformée; elle a été changée en ses premières notes de façon à ce que les violons montent une octave moins haut que le piano. Si elle est très proche de la première version, cette version orchestrée offre l'avantage de la substitution des longs accords "froids" du piano par la chaleur des accords soutenus aux cordes. | ||